A bout de souffle

Dans sa chanson « A bout de souffle » Damien Saez écrit «On est vivant temps qu’on est inconscient » et cette phrase toute simple porte en elle toutes les contradictions de la condition humaine.

Rassurez-vous, je n’ai pas la prétention de vous faire un cours magistrale de philosophie, mais juste de creuser ce sujet entre la pause clope et la pause-café:

Le savoir procure une illusion de sécurité : «  Je sais, donc je peux prévoir, établir un plan et me prémunir de nombreuses souffrances potentielles ; bref, je contrôle.»

Cette illusion peut être porteuse car elle permet de se mettre en confiance et d’agir. Et ceci est la caractéristique principale du vivant : il agit, sur lui, sur l’environnement, sur ses pensées, sur son développement et que sais-je encore… Agir au hasard, sans savoir préalable, ni plan a priori, relève de l’impossible. L’être humain a besoin d’agir en conscience, en tout cas, de conserver une forme d’illusion de causalité : «  si je fais ceci, c’est parce que et pour ceci ou cela.»

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Alors je parle d’illusion de sécurité car, j’ignore ce qu’il en est pour vous mais dans ma vie, rien ne se passe comme je l’avais prévu… A croire que je manque cruellement de savoir à la base où que la destinée s’amuse à me faire des surprises plus ou moins agréables.

Pour moi, le cosmos tout entier n’est régulé que par le chaos. Oui ! Le chaos ; dans le sens d’un état de confusion générale. Je ne crois pas en la destinée : nous sommes le fruit d’un heureux hasard. Pour ma chère Méduse, ici présente, tout est en ordre ; mais pour moi, cet ensemble n’est qu’un joyeux bordel, je n’ai aucune croyance mystique, je ne suis même pas nihiliste : croire dans le Rien, c’est déjà beaucoup trop  pour moi…

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Mais revenons au sujet de base dans le rapport entre conscience et vie. Agir demande une certaine forme de lâcher-prise puisque nous n’avons absolument aucune idée de la conséquence réelle, voir cosmique de nos actions. C’est un peu l’histoire du battement d’ailes du papillon. Le pauvre, s’il avait su que ce petit battement pouvait déclencher une tempête à l’autre bout du globe, il aurait pris un fil de sa chrysalide et il se serait pendu avec ! Donc, pour reprendre l’idée de Damien, bien vivant le papillon inconscient de l’impact catastrophique de ses petites ailes menues…

abbott-wave-interference Comment pourrions-nous vivre, donc agir en ayant parfaitement conscience de l’impact abyssal de chacune de nos actions ? Nous serions face à des questions morales inextricables tant nos actions engendrent de conséquences positives et négatives. Telles les ondes qui se propagent quand on jette un caillou dans un lac : nous maitrisons la force et la direction du jeté, nous ne maitrisons pas les ondes qu’il engendre.

Lâcher-prise sur les conséquences de nos choix et de nos actions demande une forme d’inconscience nécessaire au vivant pour se propager.

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Quid de la responsabilité personnelle soucieuse des autres et de notre environnement, du besoin de ne pas être passés sur cette terre en vain, du libre-arbitre ?

L’inconscience est la seule liberté réellement absolue qui cristallise pourtant l’impossibilité d’en jouir.  Bon, je vous ai peut-être perdu en cours de route, donc je m’explique. Celui qui est inconscient n’a aucun devoir et tous les droits. A l’instar du nouveau-né totalement dépendant et qui hurle son besoin en despote universel, l’inconscient n’est pas responsable et peut tout se permettre. Pourtant, il n’a aucune capacité d’action réelle, il ne peut donc pas jouir de la liberté de son inconscience.

Il semble donc que cette réponse à la phrase de Saez soit celle d’un Normand : Pour vivre et non survivre, nous avons besoin de nous donner des moyens que seule la « conscience » peut nous offrir. Et pour mettre ces moyens en pratique, pour les inscrire dans le réel, il faut être suffisamment inconscient pour lâcher prise sur leurs impacts…

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Enjoy !

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