Dans le jardin d’amaryllis


Dans le jardin d’amaryllis,
Y a des Iris et y a des Lys,
Y a des Jacinthes saveur de brise,
Je l’appellerai Amaryllis.

C’était une nuit printanière,
Ou Estivale, que j’en sais guère.
Un morne égout m’était trop lourd,
Que j’en suis sorti faire un tour.

C’était le temps de la famine,
Mes déjeuners j’avais jeûné.
Et comme je n’avais pas un sou,
C’est dans les arbres que je dînais.

Dans le jardin d’amaryllis,
C’est des fruitiers, abricotiers,
C’est mon abri, c’est mon moutier,
Et moi d’ici, je vois la mer.

Faut dire, je cherchais la lumière,
Dans la verdure, je m’allongeais,
Il n y avait qu’ici la clairière,
Alors, les étoiles scintillaient.

Dans le jardin d’amaryllis,
J’étais en train de faire prière,
Que vint m’inonder la lumière,
De la chambrée d’amaryllis.

Elle apparut dans ce grand soir,
Dans un immaculé peignoir.
Elle me semblait pas le savoir,
Que de là je pouvais la voir.

Pas de tissus à sa fenêtre,
C’est un oubli ou bien peut-être,
Que la jeunette fleur charnue,
Aiment ainsi dévoiler son nu.

Et elle fait tomber le rideau,
Qui lui a déguisé le corps,
Elle m’embarque alors en radeau,
Jusqu’au plus loin de tous les ports.

Dans la chambrée d’amaryllis,
Voilà la miss qui esquisse,
Un jeu de ses jambes, qui se plissent,
Plus hautes que les montagnes suisses.

Car du sommet d’amaryllis,
C’est même plus qu’on voit la mer,
C’est qu’on aimerait être son fils,
Et qu’on plaindrait plutôt son père.

Car planter cette amaryllis,
Et puis la regarder pousser,
Ça inspire plus le supplice,
Car nul droit que de respirer.

La fraicheur d’amaryllis,
Qui du haut de ses seize années,
Pousse les hommes à la hantise,
D’attendre qu’elle se soit fanée.

Dans le jardin d’amaryllis,
Moi, j’oublie tout ce que j’ai laissé,
J’me sens tout de suite comme Alice,
Enterré au fond du terrier.

Dans la chambrée d’amaryllis,
Les lueurs se sont apaisées,
Alors, j’arrête ma bêtise,
Je dessine un dernier baiser.

Sur la vitre embuée de brise,
De la chambrée d’amaryllis,
J’y accole maintenant mon ouïe,
Et je l’entends fort soupirer.

Sûrement qu’elle tente aussi les îles,
Dans un exil, dans une idylle,
Sans doute qu’elle y irait en voilier,
Plutôt qu’en barge à mes côtés.

Dans le jardin d’amaryllis,
C’était hier, c’était jadis,
Y a des bleuets, y a des jacinthes,
Et là, je crois qu’elle est enceinte.

Elle me mène dingue au plus large,
Où mon âme ne sait plus ses pieds.
Elle dresse le sein qui me rend barge,
Et elle me fait diable, endiablé!

Dans le jardin d’amaryllis,
La mer n’est plus seul horizon,
Et puis les houles sont trop lisses
Que je préfère sa toison.

Car la fleur d’amaryllis,
À la pointée de son pubis,
Y a des feuilles blondes qui hérissent,
Pas comme ces autres qui les rapetissent.

Dans le jardin d’amaryllis,
Je me le frotte et puis j’en pisse,
À m’imaginer qu’elle puisse,
Un jour m’aimer comme une actrice.

Dans la maison d’amaryllis,
Ça sent la soie dans son calice,
Chez moi, ça sent plutôt le vice,
Et le purin de cannabis.

Le miroir d’amaryllis,
Reflète un regard édifice,
La bouche de son orifice,
Annonce la gorge de son abysse.

Dans le jardin d’amaryllis,
Les innocences elles fleurissent,
Ils émigrent l’artifice,
Ces chanteurs hypolaïs.

Dans le jardin d’amaryllis,
Je n’en veux plus de ces cerises,
Maintenant, j’ai faim de ses coulisses.
De la mélisse entre ses cuisses.

Dans la chambrée d’amaryllis,
C’est un spectacle qui exile,
C’est un voyage pour les îles,
Et moi, j’en deviens scopophile.

Non, ce n’est plus amaryllis,
Qui habite ce coin paumé,
Ma fleur aurait-elle quitté Nice?
Pour aller grimper les sommets?

Dans le jardin d’amaryllis,
Y a plus d’iris et plus de lys,
Y a des orties dans les bouquets,
La vie, de moi s’en est moquée.