Vénus et Adonis

C’est un coin de forêt méconnu, près d’Anthiens.
L’un de ces bosquets denses vêtus de cyprès
Qui cachait en son temps deux ou trois sabbathiens.

La végétation filtre mal le soleil
Et donne à la lumière un aspect gris-béton,
Que reflète un lac d’or, en un acier vermeil.

Là-bas les remous dansent. Une fille est tout près
Qui répète cachée des serments indiscrets,
Pleurant un peu, je crois ; et la scène est étrange.

Trois vieilles sont nues, à genoux dans la fange.
Elles voient l’eau bien claire et ne s’y baignent pas.
Quelques vers entassés consomment leur repas.

Et mille adolescentes aux rêves putrides et moribonds, leurs chairs s’apocalypsent. Qu’éclatent les formes, soudain.  Au diable ! les fleurs saignent et le vert se répand ! Et la pourpre, et la sève, et l’ivraie ! Et la flagornerie, qui branle, qui enterre. Les dépouilles déchues des chevaux à bascule. Les ancêtres d’Eros. Un sac. Des poches, là, sous les yeux.

Pourquoi cette amertume, et quel est ce poison ?

Acide comme un mot d’amour qu’on aurait lu
Après que l’être aimé eut tourné les talons.
Et la douceur amère d’un fruit défendu.

( Mai 2011 – Septembre 2017)